Eva Wissenz
  • Accueil
  • Blog
  • Livres
  • Podcasts
  • Presse
  • A Propos
  • Contact
  • Instagram Linkedin Mastodon

Sur le temps...

Mardi 4 juin 2013, par Eva Wissenz

"Mais si le temps n’existe que dans ma tête, et si je suis le dernier être humain, il finira avec moi. Cette pensée me rend joyeuse. Il est peut-être en mon pouvoir de tuer le temps. Le grand filet se déchirera et tombera dans l’oubli avec son triste contenu. On devrait m’en avoir de la reconnaissance, mais personne ne saura après ma mort que c’est moi qui ai assassiné le temps. Dans le fond, ces pensées n’ont pas la moindre signification. Les choses arrivent tout simplement et, comme des millions d’hommes avant moi, je cherche à leur trouver un sens parce que mon orgueil ne veut pas admettre que le sens d’un événement est tout entier dans cet événement. Aucun coléoptère que j’écrase sans y prendre garde ne verra dans cet événement fâcheux pour lui une secrète relation de portée universelle. Il était simplement sous mon pied au moment où je l’ai écrasé : un bien-être dans la lumière, un courte douleur aiguë et puis plus rien. Les humains sont les seuls à être condamnés à courir après un sens qui ne peut exister. Je ne sais pas si j’arriverai un jour à prendre mon parti de cette révélation. Il est difficile de se défaire de cette folie des grandeurs ancrées en nous depuis si longtemps. Je plains les animaux et les hommes parce qu’ils sont jetés dans la vie sans l’avoir voulu. Mais ce sont les hommes qui sont sans doute le plus à plaindre, parce qu’ils possèdent juste assez de raison pour lutter contre le cours naturel des choses. Cela les a rendus méchants, désespérés et bien peu dignes d’être aimés. Et pourtant il leur aurait été possible de vivre autrement. Il n’existe pas de sentiment plus raisonnable que l’amour, qui rend la vie plus supportable à celui qui aime et à celui qui est aimé. Mais il aurait fallu reconnaître que c’était notre seule possibilité, l’unique espoir d’une vie meilleure. pour l’immense foule des morts, la seule possibilité de l’homme est perdue à jamais. Ma pensée revient sans cesse là-dessus. Je ne peux pas comprendre pourquoi nous avons fait fausse route. Je sais seulement qu’il est trop tard."

In Le mur invisible, Marlen Haushofer, Actes Sud Babel, p. 278.


Pensées, fragments, poèmes et courage... continuons à partager

Un message, un commentaire ?

Qui êtes-vous ?


Votre message

Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

Être européenne ?

J’entends beaucoup que l’Europe devrait faire ceci ou cela. Se libérer de l’influence américaine, d’accord. Guérir de la masse de malheurs infligés et subis, d’accord. Renforcer les points forts, oui mais lesquels ? Qu’est-ce que ça veut dire pour moi d’être Européenne ? Je me sens Française, (…)

Lire la suite

Plus jamais ça, vraiment ?

Quand j’ai découvert l’Holocauste, ma vie a changé pour toujours. Je voyais pour la première fois l’horreur dont les humains étaient capables. Je ne suis pas juive, cette blessure n’est pas la mienne et pourtant c’était la mienne du fait d’être humaine. Celle-ci, et d’autres. Durant ce cours (…)

Lire la suite

Pratique du nombrilisme littéraire

Alors on s’bloque (soundtrack Stromae). On proteste. On essaie de se faire entendre de Goliath pour lui dire "pas contents, pas contents" sachant bien qu’il est sourd. Sinon, on désobéit peu, on réorganise nos vies frileuses, on pétoche. Ou alors on s’engage sur le front qu’on peut tandis que (…)

Lire la suite

Ce tigre...

J’ai passé l’âge de m’intéresser aux nouveautés. Je parle ici de maturité. Il me semble en effet qu’après disons une petite décennie d’observations de l’espèce humaine, on a fait le tour. Non pas qu’on soit blasé mais on voit les cycles de fictions, on connaît les dossiers, la poudre aux yeux ne (…)

Lire la suite

Home Flux RSS Login