Ce n’est pas facile de parler du rêve commun alors que tant de différences divergentes nous séparent.
Je rêve de liberté, d’égalité et de fraternité depuis très très longtemps. Pas vous ?
En faisant les premiers pas dans ce partage de Ma Vie de Rêve, j’ai parlé d’étapes dans le changement et j’ai dit qu’Arrêter de vouloir avoir raison c’est faire un pas de géant vers les forces du calme.
Je suis fière de cette phrase, elle est belle, elle a quelque chose de majestueux et je suis convaincue de sa justesse profonde. Sauf que… comment fait-on pour arrêter de vouloir avoir raison ?
Dans la direction de la spiritualité, avec ou sans religion associée, il y a cette idée que tout est unité et que nous, humains, inventons de la séparation via nos jugements. Il s’agirait donc souvent nous pardonner nos fautes, et de nous réconcilier.
D’accord.
Ainsi, après suffisamment d’entraînement au calme pour installer en nous une sorte de stabilité durable, le jugement se mettrait-il en pause. C’est-à-dire que quoi que tu me dises et quoi que tu fasses, je n’en serai pas viscéralement déstabilisée, je n’y réagirai pas comme ça ou du moins pas dans des dynamiques d’agression / réaction / distance / coupure.
Je ne sais pas pour toi mais comme je ne suis pas une endive et que la vie est tout le temps riche en vitesse, intensité, à foison, émerveillement, tristesse, joie, allers, retours, interactions, actions, dimensions et bazars en tous genres, ça ne marche pas trop.
Dans la direction de la philosophie, on peut voir que la totalité de ce que tous les philosophes du monde entier ont proposé à l’humanité repose sur le dialogue autant que l’examen conceptuel. Et s’il arrive de trouver des pistes d’une beauté inouïe dans les dialogues socratiques, épicuriens ou stoïciens, force est de constater que la philosophie en tant que telle n’a plus rien à nous dire.
La philosophie a échoué à nous inviter à l’action. Partout où elle est passée, elle a échoué à renforcer le bien commun. Quelque part, une éthique persiste, certes, un peu comme un rêve. J’y reviendrai peut-être…
3e piste. Dans la direction de la communication non-violente, il y a l’idée qu’une identification claire de mes besoins va me permettre de les nourrir, de poser des limites nettes et créatrices de respect entre nous, et d’être tranquille quand tu exprimeras tes besoins, de ne jamais me sentir menacée puisque je me créée mon sentiment de sécurité et que j’en suis responsable, un peu comme une mini-forteresse sympa qui n’a besoin de se sentir supérieure à rien ni personne.
D’après ce que j’ai vu, les échanges qui utilisent ces outils créent toujours des dialogues fructueux, emprunts de respect et de connexion. Derrière tout cela, il y a l’idée qu’une addition de personnes en phases avec leurs besoins pourraient former un groupe apaisé, et plus tolérant, capables, peut-être, de créer de la paix. “Je n’ai pas besoin d’être d’accord avec tout ce que tu dis mais je devrais au moins tenter de le comprendre puisque le contraire de la compréhension mutuelle c’est, tout simplement, la guerre.” — Ken Wilber
D’accord.
L’invitation au calme est aussi présente dans la communication non-violente. Avec un ré-apprentissage de la langue parlée, des mots, des façons de dire « je ne veux pas », « je veux ça ». Là, c’est plus à ma portée, alors j’ai essayé et j’essaie encore. Parce que l’unité face à un coucher de soleil, j’en suis, mais face aux nouvelles du monde c’est sans moi, évidemment, ou alors avec une telle nostalgie de l’âge d’or , un tel découragement et une telle tristesse du futur qu’il n’y a plus qu’à raccrocher les gants en fait, on ne va pas se mentir, hein ?
En ce moment, les nouvelles du monde, c’est trop. Et oui, le calme et l’absence de jugement, la plupart du temps, mille fois des papillons de oui dans tous les sens. Mais à tout ce qui est toxique, salaud, immonde, qui tue, déchire, ruine, pille, bombarde, viole et éviscère, à tout cela et plus, c’est non.
Un Non qui vient du Oui m’avait un jour expliqué une vieille yogi marseillaise.
C’est serré comme approche, mais ça permet de garder pas mal de rêve vivants en soi.
Non ?
Sachant que même si je n’en raffole pas, j’ai le plus grand respect pour les endives.